Récente histoire

Certaines artificielles ont fondé leur réputation sur ces signaux petits par leur taille mais forts dans leur pouvoir de persuasion. Leur intégration dans les montages n’est pas une chose récente. Pour preuve, il nous suffit par exemple d’évoquer la fameuse «redtag». Cette vieille anglaise du 19ème siècle avait pour particularité de posséder un toupet de laine rouge sur sa partie arrière. Pendant longtemps, cette imitation d’ensemble pour le moins originale fut utilisée pour pêcher le blanc comme le chevesne, mais elle s’est peu à peu imposée dans les boîtes à mouches françaises des pêcheurs d’ombres et de truites, car ce petit signal de couleur ne laissait pas impassibles nos salmonidés. Nous pouvons aussi aborder le domaine des nymphes avec le cas de la «pheasant tail hotspot» qui a fait ses preuves et est largement utilisée par bon nombre d’entre nous. Nous allons ainsi voir comment incorporer et optimiser l’utilisation de ces petits artifices au cours d’un montage. Il y aura toujours le risque d’en abuser et au lieu d’avoir un effet positif sur le comportement du poisson, c’est tout le contraire qui se produira…

Les Tags et la nature

Qu’on le veuille ou non l’homme, bien que plein d’ingéniosité, n’a jamais rien inventé, mais a plutôt «plagié» la nature… La biodiversité de la planète révèle parfois certaines stratégies de survie, de chasse ou bien de reproduction des plus étonnantes. Les couleurs et les signaux en font partie.

Mais les poissons peuvent aussi s’en servir pour se nourrir. En regardant un peu autour de nous, nous pouvons trouver certains détails qui attirent l’attention des poissons que nous ciblons à la mouche. Prenons l’exemple de certains insectes aquatiques qui, à leur détriment, ont des attributs à  un stade de leur développement qui tapent à l’œil. Nous pouvons évoquer le cas de certaines espèces avec les masses ovigères, parfois colorées, positionnées sur l’extrémité de l’abdomen des femelles. Citons un célèbre trichoptère de début de saison: le «Cul-vert» (Brachycentrus subnubilus). Ce sedge qui éclot d’avril à juin dispose d’une boule d’œufs d’un vert plutôt éclatant et très visible. Dans un autre registre, mais toujours en gardant ce groupe d’insectes, lors de l’éclosion c’est une bulle de gaz située sur le haut de la tête qui leur permet de rejoindre l’interface de l’eau. Cette bulle devient une cible idéale que les poissons repéreront de loin. Les yeux en turban de couleurs vives des mâles de certaines espèces d’éphéméroptères peuvent attirer le regard des salmonidés. Nous savons que l’ombre est un grand curieux et que ce procédé de montage lui est parfaitement adapté, mais ne croyez pas que la truite restera totalement désintéressée et bouche fermée.

Position

En montage, il est toujours important de décomposer son imitation en trois parties distinctes: la tête, le thorax et l’abdomen. Cette approche permet de nous faciliter la tâche tout en anticipant les proportions ainsi que la tenue sur l’eau. Cette façon d’appréhender les choses prend tout son sens lorsque l’on décide d’apporter une petite touche d’originalité avec l’incorporation d’un hot spot aussi appelé «trigger point» par nos amis anglophones. Le but est de faciliter la visibilité, d’éveiller la curiosité et de déclencher l’attaque. Le grand paradoxe est qu’un tag se doit d’être visible tout en restant plutôt discret. Inutile donc d’en faire des tonnes avec une imitation trop aguicheuse qui risquerait non pas d’attirer le poisson, mais plutôt de le faire décamper. On ne peut plus en effet parler de hot spot si notre mouche est à  80% fluo. Voilà pourquoi bien connaître et maîtriser les proportions est primordial. Il n’y a pas de montage «spécial» hot spot. N’importe quelle artificielle pourra être revisitée et avoir sa décoration visuelle. Par contre, la flottaison ou le stade qui est imité sera aussi un élément déterminant pour la position d’un éventuel tag:

  • Une mouche à haute flottaison portera son spot plutôt sur son extrémité arrière (abdomen).
  • Les émergentes quant à elles permettront d’avoir une marge de manœuvre plus importante et ainsi de l’incorporer sur sa partie arrière ou centrale (abdomen ou thorax).
  • En ce qui concerne les nymphes, aucune restriction particulière, car où qu’il soit il sera bien visible et sous n’importe quel angle (abdomen ou thorax ou tête).

Bien que les imitations de type nymphe ont toutes les qualités requises pour recevoir au cours du montage un trigger point, les résultats sur les mouches de surface et celles évoluant dans la pellicule sont excellents ! Le tout est bien souvent d’oser ce soupçon d’excentricité.

Au niveau de leur composition, il n’y a pas tellement de protocole établi en ce qui concerne la qualité des matériaux à utiliser. Que ce soit simplement du fil de montage, du dubbing, du vernis, un casque, des fibres, etc, tout peut ainsi faire office de hot spot. En revanche, le choix des couleurs est le point le plus important. Le rouge, le rose, l’orange, le jaune et le vert sont les couleurs les plus appropriées. Trop rarement testé, le bleu a des qualités souvent insoupçonnées par les pêcheurs. Dans un tout autre registre, le doré et l’argenté sont des tags de choix à utiliser quand les conditions sont particulières (eau teintée, temps couvert, pénombre…).

En action de pêche, il faut savoir mettre en valeur notre imitation taguée grâce à la nature de son environnement. Cette notion concerne particulièrement la pêche en nymphe. Pour cela, il faut savoir jouer avec la couleur du fond et la végétation aquatique de la rivière, ainsi qu’avec les contrastes : hot spot clair sur un décor foncé et hot spot foncé sur un décor clair.  En procédant ainsi, votre imitation sera perçue efficacement de loin par le poisson.